Confiner et rêver en mars à Bruxelles

05/03/2021

SisterArt@expo Botanique pour voir Jetlag dream de Céline Cuvelier et le festival Photobrussels qui présente The world Within au Hangar Art center. Une expo solo et une expo collective ancrées dans notre actualité. Toutes deux invitent à réfléchir sur nos modes de vie. D'un côté, le désastre du tourisme de masse et, de l'autre, quand la création se fait domestique dans un contexte de crise sanitaire.

JETLAG DREAMS : un solo de Céline Cuvelier au Botanique

© Céline Cuvelier, Demandes d'asile déposées en Europe 1992-2018, aquarelle sur papier, 50x70cm, 2020

Le traitement pictural et plastique du tourisme de masse est certainement l'un des sujets les plus originaux que nous ayons vus ces dernières années. Les objets exposés semblent ludiques et l'approche légère. En réalité, Céline nous emmène l'air de rien vers des questions essentielles autour des déplacements : ceux dits "non-essentiels" comme le fantasme du paradis terrestre et ceux des migrations vers l'Europe perçue comme le nouvel Eldorado. S'interpénètrent la notion de découverte d'un ailleurs idyllique, et celle de destruction et pollution de ces mêmes paradis. Or, cet ailleurs rêvé par les uns est souvent fui par les autres. Deux réalités qui s'entrechoquent amèrement. En outre, elle aborde aussi la satisfaction de l'égo qui crée une émulation vers "the place to be" à ne manquer sous aucun prétexte. Plages, casinos, triples piscines et sourires à profusion où tout déborde. Avec clarté, Céline Cuvelier nous met face à ces réalités jusqu'à la pratique des souvenirs de ces tristes constats.

© Céline Cuvelier, Vue d'ensemble 1 : A) Fig.1. Evolution des composantes de l'empreinte écologique. Rapport Planète Vivante 2016, WWF. B) Évolution du taux de chômage dans les principaux pays européens, 2002-2017. En % de la population active, au sens du BIT. Huiles sur toile, chaises longues en bois d'acacia, 2020.

THE WORLD WITHIN 

PhotoBrussels festival

Exposition des photographies des 27 lauréats au Hangar Art Center


Lorsque l'appel fut lancé en mars 2020, les photographes lauréats n'avaient aucune idée de ce qui allait se dérouler dans leur pays à partir du premier confinement. C'est donc au départ d'un contexte inédit, que cette exposition a vu le jour. On peut y distinguer deux axes majeurs parmi les directions prises par les photographes : d'une part, l'exploration de l'intime - famille et lieu de vie - et d'autre part, la ré-appropriation de la nature, quasi seule possibilité qu'il nous restait de sortir, voir le monde. 

Un bel exemple de résilience créative.

Coups de cœur SisterArt

Alexandra Serrano ou l'herbier intemporel

Sur des articles de presse, Alexandra applique par cyanotype* des plantes ramassées dans ses promenades quotidiennes. 

Elle superpose et plaque la nature à l'actualité.

Ce sont les traces de la nature qui finissent par prendre le dessus sur l'histoire de l'humanité. Comme après une catastrophe écologique, la nature se régénère, elle revient... toujours. 

Dans ces photos, Alexandra propose une approche esthétique, avec un visuel et un message clair et immédiat. Sa collection est un double archivage : l'herbier et les pages d'actualités, intimement liés par le temps qui s'est figé.

*Procédé photographique permettant la création d'empreintes sur papier photosensible, donnant une impression en bleu cyan...


Lucas Leffler ou la suspension du temps

Dans son appartement, Lucas Leffler se met en scène. Ou il met en scène des objets qu'il a « sous la main ». Au temps de préparation précise et maîtrisée succède la prise de vue. Le résultat est à la fois ludique, étrange et surréaliste. Il y a comme une suspension du temps qui devient palpable. Le confinement, mais aussi le temps en suspens d'un monde intérieur, du rêve, du psychisme. 

Voir aussi Atelier Photo : https://www.photo-contraste.com


Gérôme BARRY ou les capsules en contre-pied

Décalées, très drôles et théâtrales, les capsules de Gérôme Barry sont inventives et légères. Avec ces vidéos de moins d'une minute trente, il propose un contre-pied à la solitude d'un confinement dans un petit studio parisien, mais surtout démontre combien l'imagination peut nous sortir d'une "politesse du désespoir" (Vian). Dans l'air du temps, sur youtube, il pensait faire juste un gag. Mais quand Gérôme a su qu'il avait procuré un petit moment d'évasion par l'humour, il a continué d'incarner ce personnage un brin surréaliste, inspiré à la fois par Tati et Boris Vian. Dans la veine des humoristes et chroniqueurs, youtubeurs et instagrammeurs, mais avec une composition maîtrisée du personnage et de la mise en scène. Avec justesse, ses capsules nous égayent : à voir sur Youtube "Homemade - Confinement Ep.1- Weekend in my kitchen" 

SisterArt asbl Non profit organisation